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Le Mouvement des Sans Terre se mobilise dans 18 États dont le district fédéral et bloque plus de 60 routes dans tout le Brésil

17 avril 2013, de la page du MST

17 ans après le massacre d’Eldorado dos Carajás (État du Pará), à la mémoire des 21 militants sans terre assassinés en 1996, et pour exiger la reprise de la réforme agraire, le Mouvement Sans Terre a organisé des manifestations dans 18 états et dans le District fédéral.

Le MST exige de la présidente Dilma Rousseff un plan d’urgence pour la légalisation de terres en faveur des 150.000 familles paysannes qui vivent encore dans des campements au Brésil et c’est pour appuyer cette revendication que les sans terre ont bloqué 60 autoroutes, occupé des terres improductives, des bâtiments publics, des mairies, ont organisé des marches et des actes politiques, effectué des dons alimentaires dans tout le pays.

Des manifestations ont eu lieu dans les États de Rio Grande do Sul, Ceará, Pernambuco, District Fédéral, Rio de Janeiro, Pará, São Paulo, Minas Gerais, Paraná, Bahia, Rio de Janeiro, Mato Grosso do Sul, Sergipe, Mato Grosso, Rondônia, Maranhão, Goiás, Tocantins et Piauí.

Depuis le début du mois d’avril, diverses initiatives ont été prises dans le cadre de la campagne nationale pour la réforme agraire dans ces différents Etats du Brésil. Le Mouvement des Sans Terre dénonce l’arrêt du processus de création des unités productives, à cause de la lenteur de l’Institut National de Colonisation et de Réforme Agraire (INCRA) et l’interférence du pouvoir judiciaire dans les processus d’expropriation de terres.

Il y a actuellement 523 procès liés à la réforme agraire au Brésil, dont 234 sont encore en cours  devant la Justice Fédérale. Il ya 69.233 grandes propriétés improductives dans le pays, qui contrôlent 228 millions d’hectares de terres (IBGE / Recensement de 2010) qui devraient être destinées à la réforme agraire en vertu de la Constitution.

Voici un bilan des protestations au 17 avril 2013.

Paraná

20 routes provinciales et fédérales ont été bloquées pendant 21 minutes par des centaines de travailleurs ruraux du MST, dans toutes les régions du Paraná, mercredi. Des routes ont été fermées à Cascavel, Ramilândia, Clevelândia, Renascença, Londrina, Guairaçá, Nova Esperança, Santo Inácio, Faxinal, Tamarana, Porecatu, Arapongas, Pitanga, Ivaiporã, Ponta Grossa, Rio Bonito do Iguaçu, Quedas do Iguaçu, Luiziana, et Mandaguar.

A Curitiba, 150 autres militants du MST ont tenu un rassemblement devant la Cour de justice de l’Etat pour demander le déblocage de la réforme agraire et la fin de l’impunité pour les crimes commis par les grands propriétaires fonciers. Rien qu’au Paraná, des 19 meurtres qui ont eu lieu entre 1994 et 2009, seuls quatre ont été jugés.

Pernambuco

Dans l’État de Pernambuco, le MST a continué les mobilisations avec le blocage des routes et de mairies mercredi. Environ 3200 travailleurs ont bloqué 12 routes nationales. En outre, les administrations municipales de Goiás, dans le Nord, et de Moreno, dans la région métropolitaine ont été occupés.

Environ 100 familles du Mouvement Sans Terre ont occupé ce mardi (16 avril), la Raffinerie Pimentel, située dans la ville de Santo Agostinho, dans la région métropolitaine de l’État de Pernambuco. Il s’agissait de la septième grande propriété terrienne (« latifundio ») occupée dans cet État au cours de cette semaine.

District Fédéral

Mercredi, environ 500 membres du Mouvement des Sans Terre ont défilé sur l’Esplanade des Ministères et face au Tribunal Suprême Fédéral (STF) à Brasilia. Les paysans sans terre ont organisé une manifestation devant ce Tribunal et devant le Ministère de la Justice.

Dans la matinée s’est tenue une audience publique à la Commission des Droits Humains du Sénat sur l’impunité et la violence dans les zones rurales, au cours de laquelle un hommage a été rendu aux morts du massacre de Eldorado dos Carajás.

A 11h, le MST et les fonctionnaires de l’INCRA et du Ministère de l’Agriculture ont réalisé une distribution gratuite de deux tonnes d’aliments sains, sans pesticides pour la population de Brasilia, sur la route du Plan Pilote. Parmi les produits distribués,  le manioc, la patate douce, le gombo, le haricot, les courges, les courgettes vert, tous produits dans les unités productives des zones rurales du district fédéral et des régions avoisinantes.

Sergipe

Dans l’État de Sergipe, 1600 paysans sans terre ont bloqué 10 routes à travers tout l’État, ce mercredi, en quatre points : l’échangeur de Japaratuba, Cristinápolis, l’échangeur d’Itaporanga et celui de Japoatã. Deux autres sections de la BR 235 ont été fermés : les échangeurs de Ribeirópolis et de Piñao.

Quatre autres routes nationales ont été bloqués dans les municipalités de Lagarto, Malhador, Canindé et  Gararu.

Dans la capitale Aracaju, 800 adhérents du MST ont réalisé une veillée face au Palais de Justice Fédérale, organisé une activité dans le quartier commerçant, mieux connu comme « la promenade » et occupé l’INCRA pour exiger une solution pour les plus de 10.000 familles qui vivent dans des campements dans tout l’état, depuis 16 ans. Il y a 20 terrains expropriables qui restent en souffrance devant les tribunaux.

Alagoas

Dans l’État d’Alagoas, ce mercredi, une marche a parcouru les rues de la ville d’Atalaia jusqu’au Forum de la Justice, oú sont déposés les dossiers des crimes liés aux conflits pour la terre dans la région.

Minas Gerais

Environ 200 paysans sans terre ont bloqué mercredi l’anneau routier de Belo Horizonte, à la hauteur du quartier Betania, dans l’ouest de la capitale, pendant 40 minutes. En plus de protester contre la mort des 21 militants sans terre à Carajás, ils exigent également la punition d’Adriano Chafik, qui a avoué le massacre à Felisburgo de cinq sans terre en 2004.

Ceará

Les manifestants du Mouvement Sans terre ont occupé dans la matinée du mercredi le siège de la Direction Nationale des Travaux contre la Sécheresse (DNCOS) à Fortaleza. Le Mouvement a exigé une rencontre avec les représentants de l’organisme pour discuter de plusieurs points concernant la sécheresse qui touche la région, l’une des pires de ces dernières années. Pour ce jeudi est prévue une rencontre avec le gouverneur de l’Etat Gomes Cid (PSB).

Rio Grande do Sul

Environ 1.500 membres des mouvements sociaux  MST, MAB, MPA, MMC, MD et du Réveil de la Jeunesse Populaire, ont occupé le bâtiment du ministère de l’Éducation de l’État de Rio Grande do Sul à Porto Alegre, mercredi.

La marche des manifestants est sortie de l’INCRA et du ministère des Finances, où ils campaient depuis hier. L’objectif de la protestation est d’exiger des investissements publics dans l’éducation publique dans les unités productives agricoles. Un comité composé de représentants des mouvements a été reçu par la secrétaire adjointe Maria Olalia.

Sao Paulo

Des centaines de paysans sans terre ont mené plusieurs actions dans l’état de São Paulo, ce mercredi. 150 familles des campements de la région de Laras ont occupé la grande propriété Nossa Senhora de Fátima, à Agudos.

A Ribeirão Preto, l’autoroute Anhanguera était fermée à hauteur du kilomètre 340 dans la municipalité de Sales de Oliveira, par 150 familles. Au cours des 21 minutes de fermeture de la route, la nourriture offerte au automobilistes par les Sans Terre s’est voulue une forme de dialogue avec la société et la démonstration des conquêtes de la réforme agraire.

A Sorocaba, 150 familles ont fermé la route Tavares Raposo, au km 166 (Itapetininga) pendant 21 minutes. Dans la vallée du Paraíba, les familles et alliés du MST ont occupé les bureaux de l’Institut Biosistêmico (IBS). Dans la région de Andradina brigades ont eu lieu des opérations de don du sang dans les villes de Araçatuba et de Fernandópolis.

Dans le grand São Paulo, les colons, militants et alliés du Mouvement des Sans Terre se sont réunis dans un groupe de travail et un acte politico-culturel dans le campement de la Commune de la Terre Irma Alberta.

Les militants et les familles qui vivent dans les unités productives de la région de Campinas se sont associées aux activités de la semaine de lutte pour la terre, à Limeira.

Mato Grosso do Sul

Les travailleurs ruraux du MST, avec des syndicalistes de la Centrale des travailleurs (CUT), ont fermé cinq tronçons de routes fédérales et de l’État dans l’État du Mato Grosso do Sul, mercredi.

En Sidrolandia les membres des unités productives  Emerson Rodrigues, 7 Septembre, Piuva, et les syndicalistes de la CUT, ont bloqué la route BR 060. Tout au long de l’action, les familles ont distribué des aliments et des brochures aux automobilistes.

Les familles des unités productives Ernesto Che Guevara, Ranildo da Silva, Santa Luzia et de la CUT ont bloqué la BR 163, à Nova Andradina.

A Nova Alvorada do Sul, la BR 167 a été fermée par le mouvement des sans terre de l’unité productive du 17 Avril et des unités productives Texeirinha et Florestan Fernandes. Des centaines de familles de l’unité Itamaraty ont distribué des tracts sur la BR 267.

Ont été également bloquées les routes nationales (MS-060, au KM 390 et MS-164, près de Ponta Pora). Durant 21 minutes, les manifestants ont occupé les routes et distribué de la nourriture et des dépliants aux automobilistes.

Rio de Janeiro

Le Mouvement des Sans Terre, avec le mouvement des personnes victimes de l’entreprise Vale, a organisé le mercredi un rassemblement devant l’Assemblée Générale des Actionnaires de la société au centre de Rio de Janeiro, pour dénoncer les violations commises par Vale, exigeant des réparations pour les groupes touchés.

Pour la première fois dans l’histoire de l’assemblée des actionnaires, cellec-i a été transférée dans les bureaux commerciaux de l’entreprise, à Barra da Tijuca.

Dans l’après-midi, s’est ouvert le débat «La lutte contre les entreprises dans la phase actuelle du capitalisme: l’articulation internationale des victimes de Vale » avec José de Echave (ancien vice-ministre de l’Environnement du Pérou), les mouvements sociaux et les membres nationaux et internationaux des victimes de Vale.

Pará

Deux mille jeunes sans terre du huitième campement pédagogique Oziel Alves Pereira ont fermé l’autoroute PA-150 à hauteur de la Cursa S, le mercredi matin, là où eut lieu le massacre de Eldorado dos Carajás.

L’autoroute a été fermée pendant 21 minutes, chaque minute en mémoire des ving-et-unes personnes tuées dans le massacre qui s’est produit il y a 17 ans.

Le campement, qui compte sur la participation de mouvements de jeunesse du reste du pays, organise depuis le 11 Avril pour une série d’activités de formation, avec une analyse de la situation nationale et la discussion sur le rôle des jeunes dans la lutte des classes.

A Belen, 400 travailleurs ruraux campent sur la Place des Martyrs d’Avril dans le centre de la capitale de l’Etat. Le nom de la place, en hommage aux travailleurs décédés en 1996, est aussi celui d’une sculpture de l’artiste danois Jens Galschiot, symbolisant le massacre.

Bahía

Les cinq mille militants du MST qui ont occupé  l’INCRA de Salvador ont tenu un meeting politique devant l’Assemblée Législative, ce mercredi. L’objectif était de rappeler les morts de Carajás et de demander que la justice soit faite sur l’assassinat de Fabio Santos da Silva, coordinateur du MST tué de 15 tirs au début du mois, dans la municipalité de Iguai, dans la région sud-ouest de Bahia.

Après cet acte, les paysans Sans Terre ont organisé une activité suivie d’une veillée à la Cour fédérale de Justice de l’État, pour faire pression au sujet des 49 zones de l’État qui ont été autorisés à bénéficier de la réforme agraire.

Mato Grosso

Dans la matinée de mercredi, les membres du MST ont effectué deux fermetures de routes dans le Mato Grosso. 200 Sans Terre ont fermé la route Br 070, près de la ville de Cáceres et 100 autres militants ont occupé la municipalité de Dom Aquino.

Maranhao

Environ 600 familles ont fermé la route BR 222 dans la municipalité de Chapadinho, Maranhão, pour exiger une plus grande rapidité dans le processus de dotation de terres aux plus de 3000 familles qui campent dans tout l’état.

Il y a cinq ans qu’aucune famille ne bénéficie de la légalisation de terres dans l’état de Maranhão où il y a 16 campements, certains ayant déjà 15 années d’existence. Selon Edivan Oliveira, de la coordination nationale du MST, la situation est tellement critique que les plus récents ont été montés il y a six ans.

Tocantins

Dans l’État de Tocantins, a eu lieu un rassemblement pour la défense de la réforme agraire et en l’honneur des 17 ans de massacre d’Eldorado dos Carajás, dans le Campement Sebastian Bezerra, situé près de la capitale Las Palmas.

Après l’activité, 150 personnes ont bloqué pendant 2 heures TO 050, qui relie le Port National á Las Palmas.

Rondônia

Les paysans Sans Terre dans l’État de Rondônia ont bloqué cinq tronçons de la route BR 364 pour exiger la légalisation de 800 familles qui vivent dans des campements.

Piauí

800 paysans Sans Terre ferme ont occupé la grande propriété Atalaia, à 30 km de Teresina, après la fermeture durant 21 minutes d’une avenue de la capitale mercredi. Hier, 600 personnes avaient occupé l’INCRA.

Goiana

500 militant(e)s du Mouvement  Sans Terre ont occupé l’INCRA à Goiania

Traduction : Thierry Deronne

Source (portugais) : http://www.mst.org.br/content/mst-faz-mobiliza%C3%A7%C3%B5es-em-17-estados-no-distrito-federal-e-tranca-60-rodovias

Pour soutenir concrètement le MST dans sa lutte, on peut écrire à Lucas Tinti, prointer@mst.org.br

URL de cet article : https://mouvementsansterre.wordpress.com/2013/04/22/le-mouvement-des-sans-terre-se-mobilise-dans-18-etats-dont-le-district-federal-et-bloque-plus-de-60-routes-dans-tout-le-bresil/



17 avril : Journée internationale des luttes paysannes – Appel de la CLOC-VIA CAMPESINA

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Le 17 avril est célébrée la Journée internationale des luttes paysannes en hommage à la mémoire des paysannes et paysans qui ont payé de leur vie la lutte en faveur d’un monde meilleur, de la réforme agraire et de la souveraineté alimentaire, ainsi que la protection et la défense de la nature, des semences et de l’eau.

Le 17 avril 1996, à El Dorado dos Carajas, au Brésil, 19 paysans membres du Mouvement des Travailleurs Ruraux Sans Terre (MST) ont été assassinés. 17 ans plus tard, ces crimes restent impunis. Notre continent est aujourd’hui victime d’une offensive de la part de sociétés transnationales guidées par l’avidité du capitalisme financier dont les deux mamelles sont la privatisation et la marchandisation de la terre, de l’agriculture et de la nature. Aussi, les luttes et les résistances paysannes se multiplient dans toutes les régions.

L’agrobusiness, dans sa démesure habituelle, riposte par la violence, l’illégalité et la corruption: au Mexique, au Guatémala, au Honduras, en Colombie, au Paraguay, des centaines de paysannes et paysans sont assassinés par une police et une armée qui foulent leurs droits aux pieds. Au Vénézuéla, en Argentine et au Brésil, des hommes armés et des paramilitaires assassinent les paysans qui, aux côtés de leurs organisations, luttent contre le pillage auquel s’adonnent les transnationales agro-minières et les oligarchies locales. A cette violence physique s’ajoutent la criminalisation des luttes paysannes ainsi qu’une offensive massive sur les semences paysannes: aux quatre coins du continent, de nouveaux projets de loi se multiplient afin de légaliser et généraliser l’utilisation de semences transgéniques tout en freinant l’utilisation et les échanges de nos semences traditionnelles.

A l’occasion de cette journée internationale des luttes paysannes, aux côtés de ses organisations, amis et alliés, la CLOC-Via Campesina lancera des actions dans les villes et villages de plus de 23 pays. Par ailleurs, dans le cadre de l’appel de la Via Campesina à tous les continents, ces mobilisations auront une visibilité continentale et internationale.

En hommage à nos martyrs, et parce que la lutte continue, mobilisons-nous contre l’accaparement des terres, de l’eau, de nos semences traditionnelles et contre la criminalisation de nos luttes.

Chacun à notre niveau, levons-nous pour rappeler que nous sommes déterminés à défendre nos territoires, à dénoncer, à militer en faveur d’une transformation sociale, où souveraineté alimentaire, agroécologie et réforme agraire véritable constitueront la pierre angulaire du camp populaire.

Montrons notre solidarité envers le peuple du Paraguay, en organisant des mobilisations devant les ambassades du Paraguay, en dénonçant un gouvernement qui s’est saisi du pouvoir par un coup d’état et qui persécute les paysannes et paysans, en exigeant par lettre que les prisonniers politiques soient remis en liberté et que justice soit faite pour les victimes du massacre de Curuguaty.

Unissons-nous, rejoignons les actions menées au niveau local et national afin qu’elles acquièrent une visibilité au niveau continental et international au sein de la Via Campesina pour cette journée internationale des luttes paysannes.

Source : http://viacampesina.org/fr/index.php/actions-et-nements-mainmenu-26/17-avril-journde-la-lutte-paysanne-mainmenu-33/776-17-avril-journee-internationale-des-luttes-paysannes-appel-de-la-cloc-via-campesina

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Une militante des Sans Terre est emprisonnée pour avoir dénoncé la privatisation de l’eau dans l’État de Paraíba

9 avril 2013, de la page du MST

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La compagne Cícera Soares Timóteo arrêtée dans le cadre de la répression de la lutte des Sans Terre, État de Paraíba (avril 2013)

Le 8 avril 2013, les Sans Terre ont occupé le périmètre irrigué de Várzeas de Souza, dans la municipalité de Sousa, État de Paraíba, pour dénoncer le manque de rigueur dans l’inspection des terrains irrigués qui devraient être destinés prioritairement à la réforme agraire , ainsi que l’usage abusif de produits agro-toxiques dans la production agricole de maïs par le Groupe Santana, entreprise d’agro-business qui bénéficie en outre de l’irrigation.

Les travailleuses et travailleurs ruraux revendiquent l’eau pour les unités productives Nova Vida I et II, la terre pour les 350 sans terre qui vivent dans les campements de la région, ainsi que la supression de la licitation des lots de terre 20 et 21 qui totalisent près de mille hectares de terres irriguées.

Le Groupe Santana est également dénoncé par les familles des Sans Terre comme l’entreprise d’agro-business qui bénéficie le plus des politiques publiques fédérales et de l’État de Paraiba d’accès à l’eau dans les terres semi-arides : “Le Groupe Santana utilise cette irrigation pour la production de maïs et de sorgho et la fabrication d’aliments pour animaux, alors qu’en ce moment d’étiage, l’eau devrait servir en priorité pour la consommation humaine, suivie de la consommation animale, et en dernier lieu pour la consommation végétale. Elle n’est pas faite pour gonfler les comptes en banque des entreprises d’agro-buisiness”.

Le 8 mars 2012 près de cinq cents militants du MST avaient déjà réalisé une mobilisation dans cette zone.

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Répression

Pour réprimer les protestations d’avril 2013 la militante du Mouvement Sans Terre (MST) Cícera Soares Timóteo a été arrêtée et accusée de vol, de dommages au patrimoine privé et d’incendie. La note du mouvement explique que « le groupe Santana, principal priviligié des politiques de la distribution d’eau, se positionne en victime et accuse injustement la compagne Cícera par le biais du Ministère Public de l’état de Paraíba, qui a délivré un mandat d’arrêt”.

Le Mouvement des Travailleurs Sans Terre exige la libération immédiate de Cícera Soares et le retrait du mandat d’arrêt. Il promet de continuer à dénoncer et à résister à la privatisation de l’eau et de la terre et de lutter pour la transformation du modèle de production en terre semi-aride avec pour objectif le développement humain de la population de l’état de Paraíba.

Nous n’acceptons plus l’industrie de la sécheresse ni ce modéle qui déshumanise, nous dénonçons le fait que ce sont les enfants et les femmes qui souffrent le plus des déviations des fonds publics, alors que ceux-ci devraient être utilisés pour rendre vivable la terre semi-aride au lieu d’être historiquement utilisés en faveur des oligarchies, et dans le cas présent, en faveur des entreprises de l’agro-business« .

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Source : http://www.mst.org.br/Sem-Terra-e-presa-por-denunciar-a-privatizacao-da-agua-no-semi-arido-Paraibano

Traduction : Thierry Deronne

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URL de cet article : https://mouvementsansterre.wordpress.com/2013/04/10/une-militante-des-sans-terre-est-emprisonnee-pour-avoir-denonce-la-privatisation-de-leau-dans-letat-de-paraiba/



Quand prendra fin le massacre des militants Sans Terre par les mercenaires de l’agro-business au Brésil ?

Par Wesley Lima, de la page du MST

Le dirigeant du Mouvement des Sans Terre, Fábio Santos da Silva, assassiné le 2 avril de quinze balles par des hommes de main, à Iguaí, dans la région sud-ouest de Bahia, a été enterré ce 3 avril 2013.

La veillée funèbre avait commencé dans la Communauté Rurale Ribeirão das Flores, s’est poursuivie à la Chambre Municipale d’Iguaí, pour que les citoyens puissent accompagner et partager le deuil et la douleur de la famille, des amis et des compagnes et des compagnons de lutte.

A la sortie de la Chambre Municipale, la famille, les amis et les militants du Mouvement des Sans Terre ont réalisé une marche pour accompagner le cercueil jusqu’aux portes de la ville. Les percussions, les slogans repris en choeur et toutes sortes de musiques ont exprimé l’indignation générale.

Cette marche a pour but de nouer un dialogue avec la société, dans le sens de dénoncer les faits et d’exiger au pouvoir judiciaire que justice soit faite et que les assassins ne restent pas impunis” a déclaré le Député Fédéral Valmir Assunção (Parti des Travailleurs de Bahía, PT-BA).

La direction du Mouvement des Sans Terre affirme que les milittants de la région subissent des menaces continuelles dans le but de fragiliser la lutte, et d’éviter ainsi de nouvelles mobilisations et occupations de terres.

Après la marche la dépouille mortelle a été ramenée à la Communauté rurale pour y être enterrée en présence de la famille.


Combien de fois nous les paysans et travailleurs serons-nous assassinés ? C’est ce genre d’action, menée par des mercenaires, lâche et cruelle, que nous subissons dans les zones rurales du Brésil. Cet assassinat, qui a toutes les caractéristiques d’une exécution, ne peut rester impuni. Fábio, qui fut également un candidat au poste d’échevin pour le Parti des Travailleurs (PT) dans la région, était un grand lutteur, combattant et militant des causes sociales. Comme tous les militants du MST, il voulait voir la réforme agraire mise en œuvre. Compagnon Fabio, ici, nous allons continuer ton combat. Je me solidarise avec la famille. Fabio, présent, présent, présent ! » Sur ces mots s’est conclue la cérémonie.

Historique

Depuis 2010, à partir des occupations réalisées par les familles du campament Mãe Terra, à Iguaí, les militants du Mouvement des Sans Terre de la région ont commencé à recevoir des menaces des grands propriétaires.

Face aux menaces, le Mouvement a convoqué une réunion avec le Médiateur Agraire, pour dénoncer publiquement cette offensive des grands propriétaires contre la lutte pour la redistribution de la terre en vertu de la réforme agraire. Rien n’a été fait.

C’est dans ce marasme que Fábio Santos a été assassiné. C’est pourquoi les Sans Terre exigent la justice de la part du pouvoir judiciaire.

Violence dans les zones rurales



Selon la Commission Pastorale de la Terre (CPT) on a compté 29 assassinats de travailleurs ruraux lors de conflits pour la terre en 2011. Un nombre moindre qu’en 2010, quand furent assassinés 34 travailleurs.

Entretemps il y a eu une augmentationde près de 178% pour le nombre de travailleuses et travailleurs ruraux menacés de mort.

Les données démontrent que dans les zones rurales, dans les quatre premiers mois de 2010, 12 travailleurs ont été assassinés dans des conflits ruraux. Dans la même période en 2011, huit avaient été tués.

Ce qui démontre que la violence continue et que l’impunité persiste face aux assassinats et aux menaces.

Source : http://www.mst.org.br/Sem-Terra-cobram-justica-durante-enterro-de-dirigente-do-MST-na-Bahia

Traduction : Thierry Deronne

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URL de cet article : https://mouvementsansterre.wordpress.com/2013/04/05/quand-prendra-fin-le-massacre-des-militants-sans-terre-par-les-mercenaires-de-lagro-business-aux-bresil/



Les Sans Terre conquièrent une unité productive de plus dans l’État de Sergipe

4 avril 2013, de la page du MST

Ce mercredi 3 avril 2013, les Sans Terre de l’État de Sergipe ont célébré l’occupation, la mise en production de l’ex-grande propriété Japao, transformée aujourd’hui légalement en projet d’unité productive « Daniel Ricardo » dans la municipalité de Canindé de San Francisco (Haut Sertao de Sergipe).«Pour les 43 familles de l’unité agricole, c’est un jour empreint d’une grande joie : grâce à notre combat, cette terre nous appartient», a déclaré Laurena Barbosa dos Santos, coordinatrice de l’unité.

Il y a huit ans, lorsque les familles MST ont occupé le grand domaine improductif Japao, l’ancien propriétaire a réagi avec brutalité. «Une nuit, le fils du grand propriétaire et dix hommes armés ont incendié notre campement», se rappelle Barnabas, un des premiers à s’être installé sur ces terres. «Nous n’avons pu que récupérer quelques affaires et partir. La plupart des baraques furent brûlées. Tout le monde a dû déménager dans un autre campement sur le bord de la route».

Cependant, les familles n’ont pas abandonné le combat et ont reconquis les terres, démontrant une fois de plus que seule la lutte sociale apporte des conquêtes pour la classe des travailleurs. La terre a été remise aux familles des Sans Terre grâce à l’accord signé entre le gouvernement de l’Etat de Sergipe et l’Institut national de Colonisation et de Réforme Agraire (INCRA).

Selon Gileno Damascena Silva, dirigeant du MST de Sergipe, «la reconnaissance de la propriété de Japao conclut le cycle du premier Accord de la Terre, qui a permis l’établissement légal de plus d’un millier de familles dans le Haut Sertao de Sergipe». L’unité agricole a été baptisée Daniel Ricardo, en l’honneur de Daniel Ricardo dos Santos, fils de la région de Canindé, grand ami et  militant de la cause des premiers campements du Mouvement des Sans terre, décédé cette année.

Des dizaines de producteurs et d’habitants des campements du MST Sergipe ont participé à cette activité, ainsi que des personnalités et des représentants de l’État. Le vice-gouverneur de l’Etat de Sergipe, Jackson Barreto (PMDB), a réaffirmé l’importance de la réforme agraire et de la lutte du MST en faveur du développement du Brésil.

Source : http://www.mst.org.br/node/14609

Traduction : Thierry Deronne

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URL de cet article : https://mouvementsansterre.wordpress.com/2013/04/04/les-sans-terre-conquierent-une-unite-productive-de-plus-dans-letat-de-sergipe/



Une victoire : les familles d’une unité productive du Mouvement des Sans Terre obtiennent la reconnaissance légale de l’école « Zumbi dos Palmares » dans l’État de Parana
3 avril 2013. Par de Souza Geani, de la page du MST

Au bout de dix ans de lutte, les familles installées dans l’unité productive Valmir Mota de Oliveira, à Cascavel, état de Parana, viennent d’obtenir une grande victoire. Leur école a été reconnue comme l’école municipale « Zumbi dos Palmares », par voie du décret n ° 11.167 du 6 mars 2013, publié au Journal Officiel  du 13 mars de cette année. «Cette école est une nouvelle étape dans le long cours de la lutte et de la résistance», a déclaré Izabel Geni, coordinatrice régionale du MST. 

L’école itinérante « Zumbi dos Palmares » a commencé ses activités en 2003, dans le campement Dorcelina Folador,à l’intérieur de la grande propriété Complexo Cajati. Comme les écoles de la ville n’étaient pas capables d’accueillir tous les enfants et les jeunes du campement, les familles se sont vues dans la nécessité de construire leur propre centre d’études et initialement les Sans Terre ont construit l’école avec les ressources disponibles, c’est-à dire avec des bâches de plastique noire. L’école a commencé par organiser les premières années scolaires, et un an plus tard, en 2004, a offert ses services aux familles d’un autre campement qui se trouvait sur la même grande propriété. Sans salles de classe adéquates, la seule issue était de faire la classe au milieu des champs d’avoine.

En 2010, 83 familles ont pu s’installer légalement dans une partie de la grande propriété de Cajati, et c’est ainsi que fut créée l’unité productive Valmir Mota de Oliveira. L’école itinérante « Zumbi dos Palmares » devint alors partie prenante de cette nouvelle réalité, passant des classes maternelles à celles de l’école primaire et secondaire.

 Études garanties

Aujourd’hui, l’école compte 240 élèves, des classes initiales aux classes finales, et s’appuie sur une équipe de 11 enseignants d’éducation primaire et secondaire, et cinq éducateurs pour l’enseignement maternel et primaire.

Pour l’élève Marli dos Reis, de la 1ère année de secondaire, «étudier ici est bien mieux car en ville il y trop d’élèves dans les classes et on ne dispose pas de l’accompagnement de l’enseignant. Ici, nous avons cette possibilité».

Cette reconnaissance de l’école, rebaptisée « école municipale rurale Zumbi dos Palmares », oblige la municipalité à prendre en charge ses besoins.

Les travailleurs de l’unité agricole ont également introduit la demande de création d’une école pour prendre en charge l’État de Parana, mais les familles attendent toujours la conclusion des autorisations légales pour initier les constructions. L’idée est de construire un bâtiment supplémentaire à côté de l’école municipale, qui recevra aussi le nom du combattant afrodescendant Zumbi dos Palmares.

Pour pouvoir continuer le processus, les familles attendent la lettre que le Secrétaire de l’Education  municipale doit envoyer à l’Institut National de Colonisation et de Réforme Agraire (INCRA), demandant l’octroi d’utilisation du terrain et ainsi pouvoir commencer les travaux.

Source : http://www.mst.org.br/node/14605

Traduction : Thierry Deronne 

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Un dirigeant du Mouvement des Sans Terre exécuté de 15 balles dans l’État de Bahia

De la Page du MST, 2 avril 2013

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Le matin  du mardi 2 avril 2013, Fábio dos Santos Silva (photo), dirigeant du Mouvement des Travailleurs Ruraux Sans Terre de l’État de  Bahia, a été sauvagement exécuté par des hommes armés devant sa femme et son enfant.

L’information est fournie par M. Valmir Assomption (Parti des Travailleurs de l’État de Bahia) :

«Nous sommes bouleversés et révoltés à l’heure de dénoncer l’assassinat du dirigeant du MST de Bahia, Fábio dos Santos Silva. Fabio a été exécuté en fin de matinée de 15 tirs effectués devant sa compagne et un enfant qui se rendaient en voiture à Palmerinha, district proche de Iguaí, dans le sud de Bahia.

Selon la compagne de Fabio, une moto a intercepté la voiture et deux mercenaires ont exécuté Fabio. Lui qui avait déjà été menacé de mort dans la région de Iguaí où les propriétaires terriens refusent la démocratisation de la terre et la présence de trois unités productives et d’un campement des travailleurs ruraux sans terre, vient de perdre la vie. Je me demande combien de nos paysans et de nos ouvriers devront encore être tués ? C’est ce genre d’action, menée par des mercenaires, lâche et cruelle, que nous subissons dans les zones rurales du Brésil. Cet assassinat, qui a toutes les caractéristiques d’une exécution, ne peut rester impuni.

Fábio, qui fut également un candidat au poste d’échevin pour le Parti des Travailleurs (PT) dans la région, était un grand lutteur, combattant et militant des causes sociales. Comme tous les militants du MST, il voulait voir la réforme agraire mise en œuvre.

Compagnon Fabio, ici, nous allons continuer ton combat. Je me solidarise avec la famille.

Fabio, présent, présent, présent !

Le Mouvement des Sans Terre est en deuil.  »

Source : http://www.mst.org.br/content/dirigente-do-mst-%C3%A9-executado-por-pistoleiros-com-15-tiros-na-bahia

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« Les haïtiens ont besoin de solidarité, pas de soldats ! » par Joao Pedro Stedile, de la direction nationale du Mouvement des Travailleurs Ruraux Sans Terre

Chères amies et amis,

je viens de rentrer d’un voyage à Haïti où j’ai participé à un congrès de son mouvement paysan. J’ai profité de cette occasion pour visiter plusieurs régions du pays et les projets que la brigade de la Vía Campesina/ALBA développe en solidarité avec le peuple haïtien.

haiti

Je voudrais commencer ma lettre en évoquant les caractéristiques principales de cette nation. C’est un pays montagneux de la taille de l’État brésilien d’Alagoas (27 mille kilomètres carrés), couvert de montagnes comme l’État de Minas Gerais, des montagnes totalement dévastées ou privées de couverture végétale car les paysans au fil des décennies, ont dû recourir au charbon comme unique source d’énergie et de revenus. Toute l’alimentation d’Haïti est préparée au charbon. Pas de cusinières à gaz, mis à part dans les quartiers riches de Port-au-Prince. Le climat est semi-aride dans tout le pays. Il ne pleut que trois mois par an, après vient une sécheresse digne de notre Nord-Est… Ce petit pays surpeuplé compte dix millions d’habitants dont 95% d’afro-descendants et 5% de mulâtres.

Ce sont les héritiers de la première grande révolution sociale de l’Amérique Latine, lorsqu’en 1804, ils se sont rebellés contre les colonisateurs français qui les exploitaient comme esclaves et les condamnaient à un espérance de vie de 35 ans. Ils ont expulsés tous les colonisateurs, ont éliminé l’esclavage et ont redistribiué les terres. Et comme ils savaient que les colonisateurs pouvaient revenir plus armés, ils ont occupé les montagnes, oú ils vivent encore aujourd’hui.

Les colonisateurs revinrent mais ce n’était plus les français mais les capitalistes états-uniens qui occupèrent le pays pendant les premières décennies du Xxème siècle. A leur départ ils laissèrent la dictature du pro-états-unien Duvalier qui a terrorisé la population de 1957 à 1986. L’ont suivi des gouvernements temporaires.

En 1990, fut élu le père Arístide, qui adhérait à la Théologie de la Libération. Il ne démissionna pas, fut renversé par les  états-uniens qui l’emmenèrent à Washington pour lui donner des cours de néo-libéralisme. Il est revenu en bon élève pour accomplir un nouveau mandat.

Ensuite fut élu le Président Préval, qui a réussi à accomplir son mandat mais sans aucun changement démocratique. L’actuel gouvernement est manoeuvré par les États-Unis, au terme d’une campagne électorale où 25 millions de dollars ont été investis. Tous savent en Haïti que le peuple ne l’a pas élu.

Il y aurait dû avoir des élections pour former le nouveau parlement, dont le mandat a expiré il y a plus de six mois. Mais personne n’en parle. Il n’y a donc pas de parlement légalement constitué, bien qu’il fonctionne. En pratique le pouvoir réel est exercé par les troupes des Nations Unies, sous le sigle de Minustah !

Ainsi donc, bien qu’il se soit libéré de l’esclavage, le peuple haïtien a vécu peu d’années de démocratie (bourgeoise).

Le peuple vit dans des conditions de pauvreté extrême, avec des carences alimentaires et en biens matériels. La pauvreté s’est aggravée avec le tremblement de terre de janvier 2010 qui a tué des milliers de personnes et a détruit pratiquement toute la ville de Port-au-Prince. Mais c’est un peuple qui maintient sa dignité et sa fierté, uni par la cultura, par la langue créole, que lui seul parle dans le monde, et par le vaudou (équivalent à notre candomblé), pratiqué par presque toute la population. Il y a une sorte de syncrétisme religieux : le dimanche à la messe, le vendredi à la fête.

Dans les zones rurales, il n’y a pas d’écoles. 70% de la population vit en milieu rural. L’analphabétisme affecte 65 % de la population. Il n’y a pas d’énergie électrique à l’intérieur du pays, rien qu’à Port-au-Prince. Il n’y a que trois routes nationales asphaltées. Et pas d’eau potable. Tout le monde doit acheter de l’eau potable aux prix internationaux.

L’an passé, pour la première fois dans son histoire, Haïti a souffert d’une épidémie de choléra qui a tué des centaines de personnes. La maladie médiévale fut apportée par les troupes du Népal de la Minustah, qui faisaient leurs besoins dans le fleuve principal du pays. Quand un tribunal international se décidera-t-il à juger les Nations Unies pour ces morts ?

Plus de 65% de tous les aliments sont importés ou arrivent sous la forme de donations, et la bourgeosie commerçante noire s’en approprie, qui exploite la population.

Quand les familles réussissent à trouver une ressource ou l’autre pour acheter les produits qui viennent de la République Dominicaine, c’est parce qu’elles reçoivent des aides de leur famille travaillant aux États-Unis.

Chávez a sauvé le peuple de Haïti du chaos en apportant le pétrole par le biais du programme Petrocaribe, et a proposé que le gouvernement local destine les ressources à des projets sociaux. Le combustible est revendu par les distributeurs mais le gouvernement n’a jamais expliqué à la population à quoi sont consacrés ces revenus.

Avec un tel scénario il n’est pas difficile d’imaginer quand viendront les prochaines révoltes populaires. Mais ne vous en faites pas, 12 mille soldats de nombreux pays, coordonnés par l’armée brésilienne sous les sigles des Nations Unies, sont là pour contenir de possibles révoltes. Ils circulent en convois fortement armés, rien que pour dire au peuple : « Ne l’oubliez pas, nous sommes ici pour maintenir l’ordre ! » L’ordre de la pauvreté et du nouvel esclavage. Pas de guerre, ni de violence (les taux d’homicides sont les plus bas d’Amérique Latine) : les soldats ne sont là que comme des policiers.

J’ai demandé aux soldats brésiliens ce qu’ils font là puisqu’ils ne manient même pas la langue créole pour communiquer avec la population. La seule réponse que j’ai obtenue est que s’ils s’en vont, ce sont les États-Unis qui viendront… et qu’ils sont beaucoup plus violents !

Le peuple de Haïtí n’a pas besoin de soldats armés mais de solidarité pour développer les forces productives de son territoire et pour produire les biens requis pour satisfaire les immenses nécessités dont il souffre.

Le peuple de Haití a besoin d’appui pour avoir de l’énergie électrique, un réseau de distribution de gaz pour cuisiner et éviter la déforestation. Il a besoin d’un réseau d’eau potable et d’écoles couvrant tous les niveaux, dans tous les villages. Il a besoin de semences et d’outils. Pour le reste il sait très bien coment faire. Il est là, depuis 1804, peuple libre, qui survit et se multiplie malgré tant d’exploiteurs étrangers.

Il y a heureusement d’autres visions dans la manière d’entrer en relation avec la population haïtienne. Le gouvernement de Bahia a envoyé des citernes pour stocker l’eau de pluie, ce qui est bien reçu là-bas. Petrobras (compagnie nationale brésilienne du pétrole) nous a aidés à financer le voyage de 77 jeunes paysans pour qu’ils étudient l’agro-écologie au Brésil. L’église catholique de Minas Gerais a réalisé une collecte spéciale dans toutes les paroisses et finance des projets de développement agricole là-bas, avec des potagers, des élevages de poules, de chèvres et même la multiplication de semences.

Et nous, mouvements sociaux de la Vía Campesina du Brésil, avec nos faibles ressources, maintenons en Haïti une brigade permamente de jeunes volontaires depuis plus de six ans, qui développent des projets d’agriculture, de construction de citernes et d’éducation.

Il faut bien mesurer l’indignation du peuple d’Haïti vis-à-vis des troupes de la Minustah. Si les Nations Unies voulaient envoyer des soldats pourquoi n’ont-elles pas suivi l’exemple de l’Équateur et du Venezuela, dont les soldats n’ont pas d’armes et construisent des maisons, des routes et des dépôts ? Ou l’exemple de Cuba qui maintient sur place cinq mille médecins volontaires dans l’unique service public de santé existant dans le pays, celui où travaillent ces médecins humanistes, donnant un bon exemple de la pratique du socialisme ?

Je crois que notre obligation en tant que frères du peuple haïtien est de continuer à protester et à exiger que les troupes se retirent d’Haïti, de la même manière que nous refuserions sa présence au Brésil ou dans n’importe quelle autre partie du monde. Et de maintenir la solidarité à travers les projets de développement économique et social.

João Pedro Stedile (photo) est membre de la Coordination Nationale du Mouvement des Travailleurs Ruraux sans Terre (Brésil) et de la Via Campesina Brésil.

Source (espagnol) : http://alainet.org/active/62927

Photos : MST

Traduction : Thierry Deronne

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